Accueil A la une photo Au revoir plastique, bonjour pavé ! La Sasminimum, un exemple de circularité.

Une politique « zéro déchets » est possible en Ile-de-France

Tribune publiée dans Reporterre le 10 octobre dernier, avec Corinne Rufet, vice-présidente à l'énergie et l'environnement de la région Ile-de-France. La tribune est publiée alors qu'a lieu le samedi même un rassemble contre la reconstruction de l’incinérateur d’Ivry.


Nous avons un défi majeur, en amont de la COP 21 : celui de diminuer le plus possible notre impact sur l’environnement. Nous disposons de véritables moyens d’action, parmi lesquels l’inscription résolue dans une trajectoire zéro déchet. L’objectif est simple : réduire toutes les sources de gaspillage, donner une seconde vie aux produits et recycler tout ce qui est recyclable. En d’autres termes, nous devons choisir de préserver la matière plutôt que de créer des déchets que l’on devra enfouir ou incinérer au détriment de notre environnement.

Les états généraux de l’économie circulaire du Grand-Paris ont permis de faire émerger 65 propositions pour un territoire qui crée des ressources à partir de ses déchets, une véritable solidarité des territoires pour une excellence environnementale, et pourrait permettre de créer jusqu’à 50.000 emplois durables et non-délocalisables. La région Île-de-France, par délégation de l’État, assume par ailleurs la responsabilité de planificateur, notamment en définissant des objectifs de réduction, de recyclage et de valorisation des déchets, mais également en fixant des objectifs de rééquilibrage territorial, où les installations et équipements de déchets puissent être répartis équitablement sur le territoire francilien.

Une opportunité extraordinaire

Nous avons l’impératif d’agir aujourd’hui pour préserver l’avenir. Ainsi, le Collectif 3R et Zero Waste France, appuyés dans cette démarche par une mobilisation citoyenne et par des experts reconnus, ont élaboré un plan ambitieux de réduction de nos déchets : le plan B’OM (baisse des ordures ménagères). Il propose trois chantiers principaux et douze actions prioritaires : tri à la source des biodéchets, focus sur le papier-carton et amélioration des performances de tri y figurent en bonne place. La production de chaleur, l’équilibre économique entre les banlieues et Paris et le potentiel de création de plus de 700 emplois sont aussi au cœur de ce plan. Il permettrait d’ici 2023, de cesser la mise en décharge et l’incinération d’ordures ménagères sur une partie de notre territoire. Ce projet mérite notre attention, tant il constitue une opportunité extraordinaire en termes de développement économique local et de redressement écologique.

Pourtant, il est prévu un autre projet, chiffré à deux milliards d’euros : le renouvellement de l’incinérateur d’ordures ménagères situé à Ivry-Paris 13. Ce projet pharaonique a été pensé il y a dix ans par le Syndicat intercommunal de traitement des ordures ménagères (Syctom) de l’agglomération parisienne, à une époque où les tonnages des ordures ménagères étaient massivement plus importants et le recours à l’incinération la norme. La construction de ce nouvel incinérateur est prévue en trois phases distinctes : organisation et études préparatoires, construction d’une unité de valorisation énergétique puis enfin d’une unité de valorisation organique ; dont aucune ne résulte d’une analyse d’un scénario zéro déchet pour les collectivités membres du Syctom. Or, la construction d’un incinérateur incite à maintenir de grandes quantités de déchets à incinérer pour rentabiliser l’investissement, et entrave donc un avenir orienté vers la valorisation de nos déchets-ressources.

Il n’est pas trop tard pour décider d’un moratoire

La région Île-de-France devra, dès 2016, définir la capacité maximale des installations de traitement et de valorisation sur le territoire francilien. La question de la reconstruction de l’incinérateur d’Ivry sera par conséquent une des discussions majeures de la future assemblée régionale, qui aura la responsabilité, à minima, d’examiner toutes les solutions avant de permettre l’engagement du Syctom dans un chantier de 2 milliards d’euros.

Il n’est pas trop tard pour décider d’un moratoire, comme la région Île-de-France l’a fait pour la Seine-et-Marne sur les déchets de chantier. Il faut prendre le temps d’examiner toutes les alternatives possibles à l’incinération ; nous avons vu qu’elles existent ! Reprenons donc les choses dans le bon ordre : fédérons d’abord tous les acteurs et toutes les énergies du territoire pour réduire, réutiliser et recycler nos déchets plutôt que les incinérer. Il n’est jamais trop tard pour bien faire.